Background
1. Quelle(s) formation(s) avez-vous suivie(s) lors de vos études ?
J’ai terminé en 1995 une Licence en Biologie, section botanique. J’ai ensuite réalisé un Diplôme d’Études Complémentaire (DEC) en Chimie et Pharmacologie des Substances naturelles, puis un DEA en Sciences pharmaceutiques et finalement un Doctorat en Sciences Biomédicales expérimentales.
2. Durant combien de temps avez-vous cherché du travail, après avoir terminé vos études ?
Après la licence en biologie, clôturée par un mémoire sur l’écologie des algues des grottes de Belgique, j’ai cherché du travail pendant une année complète et sans succès. Je désirais ardemment trouver un emploi qui ait trait à l’écologie, l’environnement et qui incluait du travail de terrain. Mon rêve, à cette époque, était de participer à la gestion d’une réserve naturelle (en Belgique ou, mieux, à l’étranger en milieu alpin). Après quantité de refus, j’ai rapidement déchanté.
Voyant qu’avec mon diplôme tout neuf et ma pauvre expérience, dans un domaine qui n’intéressait personne, je ne trouverais rien d’autre qu’un emploi de délégué médical, j’ai décidé de reprendre une année complémentaire à l’Université (DEC) et ce, malgré le désaccord de l’ONEM. Bien m’en a pris : c’est ce qui a permis de me lancer dans une nouvelle voie et de m’introduire dans un autre secteur de la recherche.
3. Quelle méthode avez-vous appliquée afin de trouver du travail ?
La seule méthode qui m’a été bénéfique pour les différents emplois que j’ai eu jusqu’à présent est celle des contacts : j’ai toujours obtenu un emploi auprès de personnes que je connaissais déjà préalablement, que ce soit de près ou de loin. De plus, je n’ai jamais considéré que rendre un service (même si parfois celui-ci vous éloigne de votre propre tâche) était une perte de temps ou d’énergie : mettre du cœur à l’ouvrage est valorisant pour soi-même et aussi, je pense, une bonne manière de se faire connaître voire apprécier pour son travail. Lors de mes dépôts de candidature, apporter directement un CV, en mains propres, après une prise de rendez-vous par téléphone a toujours été plus payant qu’un envoi « anonyme » par la poste ou par e-mail.
4. Pouvez-vous, en quelques mots, nous expliquer le parcours professionnel que vous avez suivi ?
Durant et après le DEC, j’ai été employée à temps partiel comme guide dans les serres de l’Université de Liège. Le DEC m’a permis de faire connaissance avec le Département de Pharmacie de l’ULg. J’ai été autorisée par le professeur de Pharmacognosie, M. Angenot, à venir travailler dans son laboratoire en tant qu’assistante volontaire. C’était un travail non rémunéré. L’année suivante, j’ai obtenu un Grant FNRS Spadel pour étudier, durant un an, la flore des eaux de consommation. Je suis donc retournée à mes anciennes amours, à l’Institut de botanique. Après deux publications suite à mon travail volontaire en Pharmacognosie, M. Angenot m’a engagée pour la réalisation d’un DEA qui portait sur les propriétés anti-inflammatoires de composés d’origine végétale. Durant ce DEA, j’ai été réaliser de nombreux tests in vivo chez le professeur Damas (Laboratoire de Physiologie humaine, ULg) : un poste d’assistant s’est ensuite ouvert, j’ai postulé et je l’ai obtenu. C’est là-bas que j’ai entrepris ma thèse de doctorat sur les propriétés anti-inflammatoires des proanthocyanidines du Cassis. J’ai également encadré les travaux pratiques des étudiants en médecine, pharmacie, dentisterie et sciences biomédicales. Maintenant, je travaille au Laboratoire de Biologie des Tissus conjonctifs (ULg) pour un projet Région wallonne portant sur le traitement de la fibrose sous-épithéliale bronchique touchant les asthmatiques.
Evaluation personnelle de votre parcours professionnel
1. Avez-vous rencontré des difficultés dans votre parcours professionnel ? Comment les avez-vous résolues ?
Les difficultés que j’ai rencontrées se sont, jusqu’à présent, concentrées au début de mon parcours professionnel : trop peu de réalisme face au marché du travail, trop peu d’expérience, trop peu de contacts. Je désirais absolument rester, si pas dans le domaine de l’environnement, au moins dans celui de la recherche scientifique. Je me suis donc réorientée afin de sortir du carcan de l’écologie-botanique. Même si cela n’a pas été facile, (au point de vue financier mais aussi au point de vue de la reprise d’un cursus universitaire s’éloignant de ma formation de base), j’ai eu la chance de tomber dans un bon créneau.
2. Votre parcours professionnel vous a-t-il demandé/vous demande-t-il toujours beaucoup de sacrifices (personnels, familiaux, horaires contraignants, …) ?
Reprendre des études et passer des sessions d’examen, rédiger des articles, des demandes de crédit, des mémoires et des doctorats alors que des amis d’un âge comparable travaillent « normalement », cela peut paraître contraignant, tout comme se remettre constamment à niveau (ce n’est pas toujours simple de donner des TP en physiologie humaine lorsqu’on est botaniste), faire des heures supplémentaires non payées (travailler le soir ou un dimanche!!!), ne pas avoir d’horaire fixe ou partir à l’étranger (Mon dieu, tu es au moins mieux payée pour ça…?). Je pense que c’est le lot de chaque chercheur. Si cela commence à paraître trop contraignant, c’est qu’il faut changer de métier.
Cependant, il est vrai qu’il faut également tenir compte de sa famille. C’est sans doute à ce niveau que la gestion de l’emploi du temps est plus délicate. J’ai heureusement toujours eu dans mon entourage des personnes compréhensives avec lesquelles cela n’a jamais posé de problème.
3. Avez-vous, à un moment, décidé de quitter la Belgique pour aller travailler à l’étranger ? Si oui, quelles en étaient les raisons et comment vous y êtes pris pour trouver ce travail (temporaire ou définitif) à l’étranger ? Avez-vous rencontré/résolu certaines difficultés ?
A la fin de mon doctorat, M. Damas, mon chef de service m’a proposé un stage de quelques mois à Montréal, chez un de ses collègues (toujours le système des « contacts »). Avec les chercheurs du laboratoire de Montréal, nous avons monté un petit projet en relation avec mon sujet de thèse et je suis partie. La raison principale de mon départ était d’enrichir mon CV, la raison secondaire, de faire un break avec la Belgique et la raison officielle, de vérifier l’activité de mes produits sur des cascades spécifiques du processus inflammatoire. J’étais en fin de doctorat, j’avais la chance d’avoir suffisamment de résultats pour rédiger une thèse cohérente et je suis donc partie à l’Université de Montréal le cœur léger, en me disant que si résultats il y avait, ce serait parfait, sinon, ce ne serait pas un drame.
Les seules difficultés rencontrées sont celles inhérentes à la paperasserie obligatoire pour le départ. Un absentéisme récurrent des personnes qui devaient me fournir la photocopie du papier Machin ou de la convention Bidule (à insérer au dossier Truc à rentrer à l’ambassade pour avant-hier) a été ma malédiction principale. Il faut donc compter environ trois fois plus de temps que ce qui paraît raisonnable pour boucler un dossier de demande de permis de travail…
4. Et si c’était à refaire… ?
Je ne regrette pas mon chemin. J’aimerais juste un peu plus de facilité d’accès sur la rampe de lancement. J’opterais peut-être pour une autre formation de base (pharmacie, médecine voire, pourquoi pas, un graduat en biotechnologies).
Fonction actuelle
1. Quelle est votre situation/fonction actuelle ?
Je termine actuellement la deuxième année d’un contrat de 4 ans pour un projet Région wallonne à l’Université de Liège. Je suis chercheuse dans une équipe pluridisciplinaire. Mon travail consiste principalement en manipulations de biologie moléculaire, à côté du travail de paperasserie immanent à ce projet. Je ne fais plus d’enseignement.
2. Quelles sont les qualités nécessaires pour pouvoir remplir une telle fonction ?
La persévérance est sans doute l’atout le plus utile.
3. Vos études vous ont-elles bien préparé à votre fonction actuelle ?
Absolument pas. Durant mes années de licence, je n’ai eu que quelques heures de cours sur les techniques de biologie moléculaire. Les cours de 3ème cycle (DEC, DEA) et les emplois que j’ai eu précédemment n’avaient pas non plus de relation directe avec ce que je fais actuellement. Je suis donc arrivée à ma fonction de « post-doc » comme une novice, excepté quelques manipulations durant ma thèse. Cela s’est toujours déroulé ainsi pour la plupart de mes emplois : j’ai appris les techniques de phytochimie et les manipulations in vivo et in vitro sur le tas.
4. Quels sont, pour vous, les avantages et les inconvénients de votre fonction actuelle ?
L’avantage est la liberté dans la manière de mener ma partie du projet de recherche (timing, méthodes, orientation). Le travail en équipe multidisciplinaire est également très stimulant. Je ne vois pas spécialement d’inconvénient majeur.
5. Votre situation actuelle est-elle celle que vous aviez imaginée en sortant de vos études ? Si non, quels étaient vos premiers objectifs ?
Absolument pas. A l’époque de mon cursus universitaire en biologie, les années de candidatures (baccalauréat) étaient suivies d’un choix : une licence (master) en botanique, zoologie ou biochimie. Mon choix s’est porté sur la botanique, entre autre parce que je ne désirais pas risquer de faire de l’expérimentation animale par la suite, ni, d’ailleurs, me lancer dans la biologie moléculaire (qui me paraissait, pour le peu de théorie que j’ai vais engrangé à l’époque, fortement rébarbatif). Finalement, j’ai tout de même travaillé plus de 6 ans sur des rats et des souris et actuellement, je jongle intensivement avec les techniques de PCR, les transfections de siRNA et la quantification d’expression de miRNA. C’est évidemment très loin du désir initial de travailler dans des réserves naturelles alpines…
6. Regrettez-vous certains choix pris dans le cadre de votre parcours professionnel ?
Non. Ce sont des choix que j’ai faits en connaissance de cause. Ils m’ont tous apporté de l’expérience et de la nouveauté.
Vision de votre avenir professionnel
1. Avez-vous personnellement, dans votre fonction actuelle, des perspectives d’avenir ? Désirez-vous continuer dans le même secteur ?
A l’heure actuelle, je n’ai pas de perspective d’avenir pour le poste que j’occupe. Je considère qu’il me reste deux années pour trouver un nouvel emploi. Je ne me limite pas dans le choix de mon futur emploi. Je suis passée de l’écologie des algues à la phytochimie puis à la physiologie avant d’arriver à la biologie moléculaire. J’ai toujours dû me remettre à niveau à chaque nouveau contrat. Il y a toujours le stress au départ d’arriver dans un projet dont on connaît peu la théorie et la technologie, la peur de paraître « ridicule ». Mais on y survit très bien si l’on se motive et se prend au jeu et l’on s’enrichit énormément. Le fait d’avoir une carrière variée ne permet certes pas de se spécialiser dans un domaine et de devenir une élite mais cela permet d’avoir une vision large d’un projet, de pouvoir appréhender plus de problèmes par le fait d’avoir déjà touché à beaucoup de choses.
En conclusion, je pense que je ne continuerai pas dans le même secteur. Il n’y a pas de raison que cela change!
2. Est-ce, de manière générale, un secteur où les perspectives d’emploi sont bonnes ?
Les perspectives d’emploi à durée déterminée pour les jeunes chercheurs, et particulièrement ceux désirant entreprendre un doctorat, sont bonnes. Il y a, de manière générale, un bon turnover dans les universités. Par contre, il est peu probable de faire carrière dans un laboratoire universitaire.
Conseils aux jeunes diplômés
1. Conseilleriez-vous les études que vous avez réalisées à une personne désireuse d’occuper une fonction similaire à la vôtre ?
Absolument pas. Je pense que la biochimie ou les sciences biomédicales seraient plus appropriées pour aborder de manière plus sereine un tel emploi. Ceci dit, le cursus universitaire actuel en biologie est probablement plus complet en ce qui concerne la biologie moléculaire qu’il ne l’était il y a 15 ans.
2. Avez-vous des conseils à donner aux jeunes scientifiques nouveaux diplômés ?
N’attendez pas que quelqu’un fasse le premier pas à votre place, c’est une perte considérable de temps et d’information : foncez mais restez humble.
Osez les collaborations. Osez apprendre de nouvelles choses : les personnes motivées ne sont jamais ridicules. Osez questionner, tout le monde (une personne extérieure, novice, peut révéler des failles dans la rédaction d’un projet de recherche, par exemple). Osez aider. Ne vous dites pas que vous n’avez pas de temps pour vous investir. Et surtout, ne vous limitez jamais.